samedi 22 janvier 2011

La physiothérapie est-elle une science ?


Je me plais certainement à penser que la réponse à cette question est oui.  Nous sommes tous des professionnels diplômés de la faculté de médecine et maintenant, il faut une maitrise et parfois même un doctorat pour pouvoir pratiquer.  La démarche scientifique nous est enseignée à l’université et un bon nombre des cours obligatoires sont des sciences qui cherchent à comprendre le fonctionnement normal et pathologique de l’être humain.  Cependant, la physiothérapie en elle-même n’est possiblement pas une science en tant que telle.  Il s'agit probablement davantage d'une profession qui fait la synthèse et l’application pratique de plusieurs sciences de la santé dans le but de traiter différents troubles.  Dans mon cas en particulier, ces troubles se résument fréquemment à la présence de douleurs persistantes.  Ainsi, si la physiothérapie n’est pas une science en elle-même, à tout le moins, je crois qu’elle se doit d’avoir une démarche scientifique et se doit d’être basée sur la (les) science.  Je crois que c’est d’ailleurs une des distinctions principales de notre profession avec la multitude d’autres médecines dites alternatives ou complémentaires qui prétendent traiter la douleur.   D’autre part, l’Ordre de la Physiothérapie du Québec nous demande de baser notre pratique sur les données probantes.  Cela m’apparait une preuve supplémentaire que notre profession se veut scientifique. 
 
Si l’on accepte ce constat, cela implique que l’on ne peut pas simplement baser nos traitements sur de simples observations, anecdotes ou théories séduisantes proposées par différents «Gourous».  Pour juger de l’efficacité de nos traitements, notre expérience personnelle ne devrait pas être suffisante mais nous devrions aussi prendre en considération les conclusions des essais cliniques randomisés.  Cela ne signifie pas que l’expérience clinique n’a pas d’importance, mais plutôt qu’elle n’est pas suffisante pour servir de base principale à notre raisonnement clinique.  Bien sûr, la science n’a pas réponse à tout.  Elle est imparfaite et cela implique que nous devons accepter de composer avec une certaine incertitude.  C’est pourquoi différents traitements fréquemment utilisés par nos pairs n’ont pas été soumis à des essais randomisés et ont une efficacité qui n’est pas encore démontrée.  Ils ne sont pas inefficaces pour autant, mais leur utilisation se base davantage sur une théorie qui semble logique à priori et sur des observations empiriques. Cet état de fait ne doit cependant pas constituer un chèque en blanc pour l’utilisation de traitements non-prouvés.  Les théories proposées doivent au moins respecter les lois universelles de la physique de même que les connaissances scientifiques fondamentales.

Une pratique basée sur les données probantes 
ou plutôt basée sur la science ?

Baser sa pratique sur les données probantes veut dire que l’ont choisi des traitements qui ont une efficacité démontrée par plusieurs essais cliniques randomisés (RCT) de qualité.  Idéalement cette efficacité est aussi confirmée par une revue de la littérature.  Ainsi, ces traitements sont prouvés efficaces.  Par contre, cela ne valide pas pour autant les théories qui sous-tendent les dits traitements.  Il est donc possible, et même presque certain, qu’occasionnellement des traitements issus de théories complètement farfelues obtiennent de bons résultats lors d’essais cliniques.  C’est pourquoi non seulement nos traitements doivent être basés sur des données probantes mais aussi sur la science au sens plus large.  Une médecine qui est basée sur la science doit s'appuyer sur une théorie qui possède une plausibilité scientifique préalable.  Cette théorie doit respecter les connaissances scientifiques universellement acceptées qui sont à la base des lois de l’univers.  Ainsi, si un traitement n’a pas encore une efficacité démontrée par des RCT il devrait à tout le moins avoir cette plausibilité préalable pour mériter que l’on s’y attarde.  

L’état actuel des choses

C’est mon opinion personnelle qu’il y a à l’heure actuelle un manque de rigueur scientifique dans notre profession.  Il semble y avoir une réticence à accepter de dispenser des soins qui sont à la fois prouvés efficaces et basés sur de sains fondements scientifiques.  On dirait même qu’il y a un engouement pour des traitements qui n’ont aucune plausibilité scientifique et qui ne considèrent pas les connaissances actuelles en neurophysiologie de la douleur dans l’élaboration de leurs théories.  Je cite au passage des traitements tels que la thérapie crânio-sacrée, le relâchement myofascial ou la thérapie viscérale.  Je pourrais en nommer bien d’autre mais ce sera le sujet d’un autre «post». 

En conclusion, je crois que la démarche scientifique est essentielle en physiothérapie et qu’elle devrait être l’essence même de ce qui définit et distingue la physiothérapie.

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